⚡ Accélération #15 - Que pourrions-nous faire de significatif avec 38 milliards de dollars?
Regard critique sur le futur de l’économie, de la technologie et de la société
#Accélération est un ensemble de morceaux choisis et commentés, tirés de l'actualité. J'y offre une critique des tendances émergentes et des récits dominants dans l'espoir de transformer notre futur. Suggestions? Commentaires? Idées de collaboration? Écrivez-moi à sarah@inferencelab.ca. Si vous n’êtes pas encore abonné, c'est par ici:
Hello!
La température se maintient autour de 10 degrés à Kyiv, je profite donc pleinement de mes dernières journées d’automne avant de retourner dans le froid polaire du Québec. Néanmoins, il n’y a pas tant de choses à faire dans une chambre d’hôtel, ce qui m’aura finalement permis de monter cette courte édition toute en images malgré le boulot de la semaine!
Alors bonne lecture!
Sarah
TECHNOLOGIE
Le ciel nocturne pourrait changer à jamais et c'est la faute à Elon Musk.
Loin de nous mener vers une utopie où les villes sont libérées de la congestion, l'avènement des voitures autonomes pourrait plutôt signifier une recrudescence du trafic si elles sont utilisées par les individus comme un service de chauffeur personnel, révèle une récente étude. L’auteur nous invite à réfléchir à la façon dont cette technologie sera déployée, avant que son utilisation n’entre dans nos moeurs.
Des baleines volantes s’en viennent au Québec. Qui eut cru que le dirigeable serait une des technologies du futur!
Le 21 novembre prochain, une commission parlementaire se penchera sur la fuite des données chez Desjardins. Le mandat est restreint, mais il sera intéressant de voir l’angle d’approche de nos députés sur cet enjeu. Il y a un peu plus d’une semaine, l’ensemble des commissaires et ombudsman fédéral et provinciaux chargés de veiller à la protection de la vie privée lançait un appel afin que le Canada et les provinces encadrent au plus vite l’usage des données.
Le secteur des technologies de l’information voudrait le soutien du gouvernement québécois par le biais d’une politique industrielle. Favorable à ce type de politique, j’estime toutefois qu’elle devrait être l’occasion de réfléchir à nos priorités en matière de cybersécurité ainsi qu’à la façon dont nous règlementerons la gestion des données publiques et privées.
Google s’intéresse franchement un peu trop à notre santé. Après avoir fait l’acquisition du traqueur d’activités Fitbit pour 2 milliards de dollars, on apprend que l'entreprise a signé un accord controversé (Project Nightingale, ça s’invente pas!) avec un réseau de 150 hôpitaux américains afin d’obtenir les données médicales de millions de patients, sans leur consentement.
Selon Philip Aston, Rapporteur spécial des Nations unies sur la pauvreté extrême et les droits de l’homme, nous avançons, comme des zombies, vers un état providence numérique qui s’avérera au final être un cheval de Troie vers une société néolibérale dystopique.
ÉCONOMIE
Au Chili, 30 ans après la dictature de Pinochet (1973-1990), le peuple se rebelle enfin contre les politiques néolibérales imposées à cette époque et qui ont maintenu une majorité de citoyens dans la pauvreté pendant qu’une minorité s’enrichissait. Un épisode de la balado The Daily par le New York Times sur le sujet m’a rappelé la puissante chanson El Derecho de Vivir en Paz du militant Victor Jara (le droit de vivre en paix) torturé et tué lors du coup de 73.
Inspirés par Hong Kong, les manifestants chiliens utilisent massivement des lasers contre les forces de l’ordre.
L'OCDE explore la possibilité d'imposer une taxe minimale aux transnationales. Y a-t-il de l’espoir?
La taxe sur la richesse mise de l’avant par Warren et Sanders aux États-Unis continue de faire parler d’elle. Après les menaces des milliardaires, au tour des comptables experts du détournement fiscal de s’objecter, affirmant qu’il est impossible de bien évaluer la valeur des biens ou des compagnies privées détenus par les riches, ce qui créerait donc des injustices… Désolé les mecs, vos arguments ne passent pas.
Derrière la vague de start-ups de plateforme de services qui s’appuient sur un modèle d’affaires faisant usage de « contractuels » en lieu et place de travailleurs, il y a d’abord les dizaines de milliards de dollars de capital-risque du fonds Vision de la banque japonaise Softbank. Aucun autre fonds n’a autant misé sur ce modèle d’affaires. Ce fonds est financé en grande partie par les pétro-dollars de l’Arabie saoudite (45G$) et des Émirats arabes unis (15G$) en plus de la Softbank elle-même (25G$). Et les conséquences de leurs investissements sont pour la plupart dramatiques pour les acteurs des secteurs touchés comme l’illustre cette enquête du New York Times.
Pour la seule "journée des célibataires" (le 11 novembre), Alibaba a enregistré 38 milliards de dollars (US$) d'achats. Vous pouvez balancer cette statistique à quiconque vous dit qu'une politique progressiste ou la lutte aux changements climatiques coûte trop cher.
Dans les pays industrialisés, nous avons les outils et les technologies pour vivre bien tout en travaillant moins. Si nous ne le faisons pas, c’est par choix politique et social. Le jour où nous réaliserons collectivement cela, la société pourra commencer à changer.
Graphique : Heures de travail hebdomadaires requises, par travailleur, pour égaler la production du travailleur britannique moyen en 1930:
SOCIÉTÉ
Le journalisme est en crise et la nouvelle génération de journalistes contribue à cette transformation. Sur ce front, les sensibilités estudiantines américaines donnent déjà lieu à des arbitrages dans la couverture des journaux étudiants. Alors que nos bulles informationnelles s’épaississent, que la désinformation est omniprésente, il me semble que le droit de parler de tout, mais avec rigueur, est un des derniers remparts contre la barbarie.
Notre société est traversée par le sexisme depuis des siècles. Même si l’équité entre les sexes fait des progrès, nous sommes encore loin du compte : de la recherche médicale sur la santé des femmes jusqu’aux algorithmes qui déterminent les limites de crédit sur la nouvelle carte d’Apple, la discrimination est encore bien présente.
Au diable la crise climatique, un flot de pétrole inonde les marchés mondiaux, et ce n’est qu’un début. La quantité de pétrole est en voie d’exploser en 2020 et 2021 alors que le Canada, le Brésil, la Guyane et la Norvège produiront un total d’un million de barils de plus par jour. Selon le New York Times :
Au Canada, l'oléoduc de la ligne 3, d'une longueur de 1 000 milles, qui transportera le pétrole des champs de l'Alberta jusqu'au Wisconsin, est presque terminé et attend les derniers permis. Selon les spécialistes de l'énergie, cela pourrait accroître la production canadienne d'un demi-million de barils par jour, soit environ 10 p. 100. (traduction)
Dans les circonstances, le prix du pétrole continuera de baisser. Ce n’est pas l’exportation de ses ressources qui sortira l’Alberta de sa crise économique comme l’illustrent bien ces graphiques:
Pendant ce temps, le secteur financier attend avec impatience la plus grosse introduction en bourse de toute l’histoire : celle d’Aramco, la première productrice de pétrole au monde, basée en Arabie Saoudite.
Et pour terminer : intrigante baladodiffusion avec Cara New Daggett, l’auteure de Birth of Energy, Fossil Fuels, Thermodynamics and the Politics of Work, qui d’une réflexion sur notre relation avec l’énergie et notre recherche constante d’efficacité en a tiré des leçons sur notre éthique du travail.
Voilà. Merci d’être là!